Lundi 13 avril 2020

Pour le Grand Mardi

Très chers amis et fidèles
Mes frères en Christ

Comme lundi, ce leitmotiv de nos trois jours : l’apolytikion de l’orthros :

« Voici que survient l’Epoux au plein cœur de la nuit ! Bienheureux celui qu’il trouvera éveillé et malheureux celui qu’il trouvera indolent car il sera jugé indigne ! Vois donc ô mon âme, ne te laisses pas vaincre par le sommeil : à la mort tu serais livrée, hors de Royaume tu serais rejeté. Mais éveille-toi en criant : « Saint, Saint, Saint es-tu ô notre Dieu ».

 

Homélie de saint Grégoire de Nazianze (En Cappadoce | mort 389)

Aussitôt après ton baptême, tu te tiendras debout devant le grand sanctuaire, pour signifier la gloire du monde à venir. Le chant des psaumes qui t'accueillera est le prélude des louanges célestes. Les lampes que tu allumeras préfigurent ce cortège des lumières qui conduira au-devant de l'Epoux nos âmes resplendissantes et vierges, munies des lampes étincelantes de la foi.

Prenons garde à ne pas nous abandonner au sommeil, par insouciance, de peur que celui que nous attendons ne se présente à l'improviste, sans que nous l'ayons vu venir. Ne restons pas sans provision d'huile et de bonnes œuvres, de crainte d'être exclus de la salle des noces.

Je vois, en effet, ce que sera ce malheur si affligeant. L'Epoux arrivera. Une voix puissante nous appellera à nous présenter devant lui. Toutes les âmes prudentes iront à sa rencontre avec leur lampe allumée et une réserve d'huile très abondante. Les autres, pleines d'inquiétude, chercheront bien tardivement à en obtenir auprès de celles qui en seront pourvues.

L'Epoux fera son entrée en grande hâte. Les premières entreront avec lui. Les autres, tout occupées à préparer leurs lampes, ne trouveront pas le temps d'entrer et seront laissées dehors au milieu des lamentations. Elles se rendront compte trop tard de ce qu'elles auront perdu par leur insouciance. Alors, malgré toutes leurs supplications, elles ne pourront plus pénétrer dans la salle des noces dont elles se seront exclues par leur propre faute.

Elles ressembleront aussi à des invités aux noces qu'un noble père célèbre en l'honneur d'un noble époux, et qui s'abstiennent d'y prendre part. L'un, parce qu'il vient de prendre femme; un autre, parce qu'il vient d'acheter un champ; un troisième, parce qu'il a acquis une paire de bœufs (cf. Lc 14,18-20). Ce qu'ils ont obtenu ainsi leur il été bien dommageable, puisqu'ils se sont privés d'un excellent profit pour des avantages médiocres.

Car il n'y a pas de place dans le ciel pour l'orgueilleux et l'insouciant, pour l'homme sans habit convenable, qui ne porte pas le vêtement de noce (cf. Mt 22,11), même s'il s'est cru, sur terre, digne de la splendeur céleste, et s'est introduit furtivement dans le groupe des fidèles en se berçant de faux espoirs.

Qu'adviendra-t-il ensuite? L'Epoux connaît ce qu'il nous enseignera quand nous serons au ciel, et il sait quelles relations il entretiendra avec les âmes qui y seront entrées avec lui. Je crois qu'il vivra en leur compagnie, et qu'il leur enseignera les mystères les plus parfaits et les plus purs.
Nous qui vous donnons cet enseignement et vous qui nous écoutez, puissions-nous y avoir part dans le Christ notre Seigneur, à qui soient la gloire et la puissance dans les siècles.

Amen.

En ce jour l’Église attire notre attention et sollicite notre méditation sur la parabole évangélique des dix vierges, et donc sur nos « fins dernières », sur les conditions requises pour entrer dans le Royaume de Cieux.

Le « Royaume des Cieux », c’est la vie de Dieu à laquelle nous sommes conviés de partager, d’acquérir, par la grâce. Cette acquisition s’opère avec notre collaboration, chacun selon sa mesure (les lampes à remplir d’huile, au contraire de l’oubli – de Dieu et de l’autre.

Le Christ en s’incarnant, en unissant notre nature à la Sienne, a redonné à notre nature malade et affaiblie le dynamisme pour nous retourner vers Lui ; Il nous a redonné le dynamisme, certes, mais il faut que nous le mettions à l’œuvre. C’est notre part de collaboration. Il n’est jamais trop tard pour opérer notre conversion, mais comme nous le présente le Seigneur à travers cette parabole, tenons-nous prêts, ne restons pas « indolents » selon le thème de ces trois jours, un jour il pourrait être trop tard.

La pandémie à laquelle nous faisons face, est sans doute aussi le signe de l’urgence : personne ne sait de quoi sera fait demain. Une chose est certaine : « rien ne sera plus jamais comme avant », nous ont prévenus nos dirigeants… Les Hébreux du temps de Jésus étaient opprimés par les païens étrangers, les Romains, et le Messie vainqueur n’est pas venu les en délivrer ni restaurer un royaume plus juste et prospère, mais les (et nous) introduire dans un Royaume « qui n’est pas de ce monde ». C’est la chambre nuptiale dont il est question dans cette parabole : lieu de l’union des hommes et de Dieu. Cette « chambre », c’est le Corps du Christ ; Il est l’Epoux, l’Humanité est l’épouse. Entrons dans la chambre nous unir avec l’Epoux, parés de la grâce lumineuse dans les lampes de nos âmes, avant la fermeture des portes… C’est ce que nous faisons lorsque nous commuions à l’Eucharistie, lorsque nos prions, lorsque nous faisons du bien à notre prochain et faisons attention à lui. Le « savoir-vivre » n’est pas à négliger : il en est une étape et la base.

Je sollicite encore l’aide et l’intercession de saint Romanos pour nous aider à sortir de notre torpeur, en vous présentant cet autre hymne composé à l’occasion de ce grand mardi.

En marche (spirituelle…, toute allusion politique serait purement fortuite…) avec vous et avec amour.

Père Elie et les sœurs.